Raffinement et Rock&Roll, une Symphonie Bistronomique
Au cœur du Vieux Bourges, à deux pavés de la majestueuse Cathédrale, se niche une pépite culinaire où l’art de la bistronomie s’entrelace harmonieusement avec les accords envoûtants du rock. Bienvenue Au Rez De Chaussée ! Stéphane, chef de cuisine et propriétaire passionné, orchestre avec brio une cuisine raffinée qui flirte avec vos papilles. Dans ce cadre intime et chaleureux, chaque assiette est une œuvre d’art, un tableau vivant où les dressages surprenants côtoient des saveurs éclatantes et authentiques. Au travers de ce savoir-faire unique, voici son histoire et celle de son équipe.
Présentation du Chef
Stéphane : Je ne suis pas né dans le Berry, mais j’ai été élevé par mes grands-parents à Lignières où j’ai passé toute ma jeunesse. J’étais un cancre à l’école, et quand on est mauvais à l’école au début des années 90, il n’y a pas beaucoup de solutions, soit on va dans la mécanique, soit dans la restauration, enfin un métier manuel par la voie professionnelle. Quand le choix s’est imposé à moi, j’ ai opté pour la cuisine, c’était une façon d’avoir encore le choix, il y avait de la pâtisserie, de la boulangerie, de la restauration classique. J’ai juste un CAP de cuisine, et ensuite, j’ai eu la chance de commencer dans un grand restaurant étoilé Michelin, et c’est ce qui a guidé mon parcours dans d’autres grands restaurants, à part quelques petites embuscades de parcours bien sûr. C’était un rythme très dur, avec une grande exigence, mais on voit des belles choses, on travaille de beaux produits, et on apprend beaucoup. Au tout début, c’est pour moi un métier et non une passion. Ça le devient avec le temps, ta vie est conditionnée comme ça de toute façon, travailler en deux services, beaucoup de jours et beaucoup d’heures, tu apprends à aimer ce métier, et un jour ça devient notre vie.
Au tour de Grég, le maître de la salle
Grég : Je suis né à Saint-Doulchard, et j’ai fait mes études à Bourges, dans le Lycée Pierre Emile Martin en électronique, rien à voir avec la restauration. J’ai été poussé par mon père qui voulait que je fasse des études, donc je suis allé jusqu’au BTS en informatique. C’est à ce moment que j’ai décroché, j’ai eu mon diplôme de justesse, et en sortant de mes études j’ai travaillé deux mois en restauration dans un hôtel restaurant à Salbris, et ça a été le déclic. Donc en juin j’avais mon BTS, et en septembre je reprenais un CAP en un an, puis un BP en deux ans.
Maintenant à Guillaume, le second de cuisine
Guillaume : Moi, c’est Guillaume, je suis né dans l’Indre, originaire de Reuilly, je suis arrivé au Rez de Chaussée depuis 2 ans, et avant, j’ai travaillé longtemps en cuisine traditionnelle. Je suis diplômé d’un CAP et d’un BEP en cuisine, après j’ai fait l’armée, ensuite, j’ai travaillé en Boulangerie Pâtisserie, puis j’ai été chef de cuisine dans un routier pendant près de vingt ans. Stéphane et moi, on se connaissait depuis très longtemps, on est passionnés de musique et de cinéma tous les deux, et tout de suite ça a matché. On a vraiment aucun point commun au niveau de la cuisine, mais c’est ce qui nous complète finalement.
Un parcours vers les étoiles
Stéphane : J’ai travaillé dans un trois macarons Michelin à côté d’Auxerre, un deux macarons à Tours, mais également à l’étranger. Quand j’ai fini mon apprentissage, je me suis dit : qu’est-ce que je fais ? J’avais envie de découvrir d’autres choses. J’ai commencé par aller en Allemagne, avec mon niveau d’Allemand et d’Anglais de quatrième, ce qui ne sert absolument à rien ! Là-bas, j’ai découvert la finesse de travailler la pomme de terre, bien plus qu’on ne se l’imagine, ils étaient très en avance là-dessus. Il y a aussi la Suisse, la Suède, qui possède une gastronomie très cosmopolite, avec des gens d’une très grande gentillesse. J’aurai pu aller beaucoup plus loin à l’époque, comme le Japon ou l’Amérique, mais la culture était tellement différente et mon niveau en langue n’était pour le coup pas adapté du tout.
Un retour haut en gastronomie
Stéphane : Je suis revenu dans la région pour des raisons personnelles, et j’ai trouvé une place dans un relais et château, au Prieuré d’Orsan, perdu au fin fond des bois, je ne pouvais parler qu’aux arbres et aux libellules. On a commencé avec une petite brigade de cuisine dont j’étais le chef, puis au fil du temps je me suis retrouvé tout seul pendant 9 ans. Un jour, j’ai eu besoin d’autre chose. J’étais ami avec les anciens propriétaires du Pub des Jacobins, Claude et Martine, et c’est elle qui m’a présenté au propriétaire du Rez de Chaussée, qui lui cherchait un cuisinier. J’avais jamais vu un type comme ça, il était vraiment atypique. En fait, il m’a donné carte blanche pour la cuisine. Je faisais le même style de carte que le resto avait, uniquement avec du frais, et ça a duré cinq ans comme ça. C’était une autre façon de voir la restauration. Lui n’était pas serveur, il s’asseyait avec les clients à table, ses potes étaient toujours dans la cuisine à goûter les plats, il aimait la déco de style broc’… Et un jour il m’a dit : « j’arrête, tu veux racheter ou tu t’en vas ? », et je me suis dit que c’était le moment ou jamais de se lancer, et j’ai racheté le restaurant.
Accorder la musique avec le lieu
Stéphane : Ma passion, c’est la musique. Dans mon idée, je voulais imbriquer la restauration, le bien-être et la musique dans mon restaurant. Je ne voulais pas faire un gastro, je venais de là et ce n’est pas ça que je voulais transmettre, donc je suis parti sur un resto bistronomique. La déco, ce sont mes vinyles, mes CD, mes cassettes d’enfant, mes objets Pop-Art qui au lieu de traîner dans mon garage meublent les étagères de la salle. Pour ça, j’ai dessiné le lieu parce que je voulais créer une maison. Il y a le coin salon avec le canapé, le coin cuisine au comptoir pour discuter avec le serveur, le coin terrasse et le coin salle à manger avec les tables. Ensuite la peinture noire au plafond et aux murs pour apporter ce côté intimiste, des petites lumières partout, et je pense que tout ça en fait un restaurant un peu unique.
Seul dans sa cuisine ... ou presque
Stéphane : Dès l’ouverture, ça a été une vraie aventure. On a commencé direct avec la période Gilets Jaunes, les week-ends, on fermait, on a vu dans la rue juste devant des mecs se lancer des pavés, les CRS qui arrivaient, c’était un peu la frayeur. Deux ans après, on a les deux fermetures pour la Covid, là ça commençait à faire beaucoup. Juste après, on a vécu un moment génial.
Les gens avaient tellement envie de sortir, on avait du monde sur la terrasse, assis sur le trottoir pour boire un verre, c’était vraiment top. Une des choses aussi qui a changé, c’est qu’il y avait une formule du midi que j’ai arrêtée. Faire des plats frais et maison qui changeaient tous les midis, ça demandait beaucoup de réflexion et de mise en place alors que je ne gagnais pas un radis dessus. Même si on a perdu une partie de notre clientèle, ça m’a permis de m’approprier la carte et le restaurant et d’accueillir des gens qui souhaitent prendre le temps et se faire plaisir.
Premier binôme entre Stéphane et Greg
Greg : Directement, après mes études, j’ai atterri ici. Stéphane cherchait quelqu’un avec peu d’expérience pour essayer de le modeler à sa façon. Donc, pour moi, ça tombait à pic. Ça a été très compliqué au début, mais avec le temps ça c’est fait. Au bout de quinze jours, je me suis ouvert la main, et j’ai été arrêté trois semaines… Le restaurant venait tout juste d’ouvrir, et c’était une catastrophe…
Stéphane : J’ai dû prendre quelqu’un d’autre, mais ça ne faisait pas l’affaire, ensuite, j’ai appelé des copains, puis les anciens patrons du Jacobin sont venus m’aider. Après, je lui ai accordé beaucoup de liberté dans sa façon de gérer la salle, je ne suis pas du tout serveur, et j’attendais de lui qu’il apporte cette sérénité où je n’interviens pas, mais qu’il apporte ce côté chaleureux que j’attends dans mon restaurant. Il a aussi la responsabilité de la carte des vins, parce que je n’en bois pas, donc il faut associer les plats aux boissons.
Greg : Même si c’est une grosse pression, j’ai apprécié d’être autonome dans la salle, être au contact des clients dans un cadre intimiste, partager la passion de Stéphane pour la cuisine, mais aussi pour la musique.
Une carte à l’image du Chef
Stéphane : Concernant la carte, j’étais déjà libre avant, mais pas avec le même matériel, on peut dire qu’elle a évolué en même temps que le restaurant. Avec le temps, je l’ai un peu réduite, pour se concentrer vraiment sur des plats raffinés et aboutis, ce sont des cartes de saison qui changent tous les trois mois, uniquement avec des produits frais, et c’est déjà pas mal de boulot. Après, c’est un travail de dressage et d’assaisonnement, sur les tables, il n’y a pas de salière ni de poivrière, c’est un travail qui est fait en amont, de trouver l’équilibre. Quand je fais une carte, je ne teste absolument rien, ni le dressage, ni le goût. J’ai une idée en tête, et c’est la réaction des clients qui nous guide. C’est ce côté spontané qui fait aussi la magie de cette cuisine, des fois ça ne marche pas du premier coup, mais c’est cette pression qui nous permet de toujours améliorer nos plats. Après, c’est selon les saisons, mais aussi de mes envies, les choses que je vois, et pour le dressage, même si je ne teste pas avant, j’aime apporter de la hauteur dans mes plats, c’est plus rare mais aussi plus compliqué. Ce que je préfère dans la cuisine, c’est le sucre. C’est pour ça que le dressage, mais aussi le nom de plats et leur détournement viennent de mes goûts. Pour finir, la dernière chose qui joue un rôle dans le fonctionnement d’un service, c’est la carte sur l’ardoise unique. Elle permet de faire choisir table par table, du coup, je reçois les bons un par un, et les gens ont le temps d’échanger ensemble sur la carte et de rythmer le service.
L’arrivée du dernier membre du trio
Guillaume : Le plus dur pour moi ça a été de m’approprier l’identité de Stéphane dans le dressage, c’est toujours en hauteur, très spontané mais réfléchi. Après, en cuisine, on avait chacun notre expérience avec des parcours très différents, et ça nous permet de nous compléter, et pour ma part d’apporter aussi ma touche dans les plats. Si on demande à Stéphane et à moi de faire le même plat, ils seront forcément très différents, et ça, j’aime beaucoup.
Le vieux Bourges mis à l’honneur
Stéphane : La vie de quartier est vraiment importante ici. Il y a quatre restaurants avec des identités complètement différentes, on s’entend tous très bien, on se dépanne les uns les autres. Même avec les commerces autour, il y a le plombier Morin juste à côté qui nous dépanne quand on a besoin, les deux coiffeurs dans la rue, c’était vraiment top. En plus, on se connaît depuis longtemps, c’est que des petits restos, c’est très agréable. Le seul défaut, c’est de nous avoir retiré les lumières bleues dans le quartier.
La petite anecdote du Rez de Chaussée
Stéphane : L’été dernier, jour de canicule, dans le restaurant, deux couverts. On reçoit un coup de téléphone à 12h30 pour une réservation à 13h30. Quand tu n’as que deux couverts un midi, tu expliques aux gens que 13h30 ça fait un peu tard, donc on refuse. Un quart d’heure après, le téléphone sonne, le type me dit ; « on passera pas à 13 h 30, mais 13h, est ce que c’est possible? », et là je lui dis que oui. Je lui demande un nom pour la réservation, et il me dit : Guillaume Canet ». Pour rire en raccrochant, je dis dans le resto, « Guillaume Canet vient manger ce midi ». À 13h, on voit une tête qui passe la porte qui nous dit : « Ça vous dérange si on mange en terrasse ? » , c’était Marion Cotillard, avec Guillaume Canet et leurs enfants.
Le plat encore jamais mis à la carte ?
Stéphane : un poisson et une viande fumés
Guillaume : le filet de bœuf Wellington
Grég : les ris de veau
Votre resto « péché-mignon » ?
Guillaume : les Trois Cépages à Reuilly
Grég : la Pasta à Bourges
Stéphane : C’est un établissement qui je crois n’existe plus, c’était à Sidiailles, un restaurant sur pilotis dont j’ai oublié le nom depuis. C’était une petite carte avec les escargots en entrée, un steak frites en plat et une crème renversée en dessert. Ce qui m’ a marqué, c’est la mamie assise dans le fond de sa cuisine qui épluchait les patates pour faire des frites maison, avec un chat qui lui passait entre les jambes, et au final, c’était le meilleur steak frites de ma vie.
Si tu devais changer le nom du Rez de Chaussée ?
Stéphane : « je crois entendre encore », une référence à l’opéra de Bizet, ou du moins une référence à la musique.
L’ingrédient qui ne sera jamais sur la carte du resto ?
Stéphane et Grég : LA CANNELLE !
T'as ti vu ce qu'en pense l'équipe ?
Il y d’abord les murs peints en noir jusqu’au plafond, puis du rock sur tous les murs, en cassettes, en CD, en Vinyles, qui résonne dans toute la salle. Ensuite, il y a la carte, qui vous fait douter de votre choix jusqu’au dernier moment, passant d’un plat à l’autre. Pour finir, les plats arrivent, et c’est toujours une agréable surprise, du dressage original et créatif, aux saveurs puissantes et raffinées. Ajoutez à ça un verre de vin sélectionné, un digestif arômatique et le moelleux du canapé au fond à droite. Aucun doute, vous êtes bien au Rez de Chaussée, là où la magie de Stéphane et de son équipe opèrent, le temps d’un moment suspendu entre Pink Floyd et un suprême de poulet jaune Orloff aux blettes et laitues crémeuses.
Interview réalisée au Rez de Chaussée le 24/05/2024
avec la participation de Stéphane Brunet, Greg et Guillaume
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