Tu manges à la cantine ce midi ?
On vous propose de réemployer ce mot «cantine» et cette phrase de notre enfance pour découvrir ce nouveau restaurant à Bourges, rue Jean Ba£ er. C’est tout coloré, ça s’appelle « Café Louve », quand on y entre, tout le monde dit « Bonjour » avec de larges sourires puis on croise le regard de Christelle, celle qui fait tout : entrepreneure, cuisinière, dénicheuse de bons produits, décoratrice, maman, créatrice de gourmandises ! Posons-lui nos questions…
Pour commencer, parle-nous de tes jeunes années de Berruyère en vadrouille.
Je suis un pur produit du Berry, je suis née et j’ai grandi à Bourges. Mon père était le chef cuisinier de la Braisière rue Barbès, et quand j’avais six-sept ans, on est parti en Haute-Savoie pour son travail. Ma mère elle, travaillait avec lui, au gré de ses aventures, parce qu’il était multi-métiers. Il était cuisinier, mais aussi traiteur, antiquaire, et maintenant, il est dans la négoce de matériaux de boulangerie.
On est revenu quelque temps plus tard, et après mes études, je suis partie à Paris où j’ai travaillé dans des agences de communication pendant cinq ans. Je suis revenue ici pour mon amoureux, après j’ai eu mes petits loulous, et on est parti à Lyon, mais finalement, on finit toujours par revenir à Bourges. Ça fait bien huit ans maintenant, et on ne s’imagine pas forcément bouger parce que c’est notre petit fief, on a toute notre famille autour aussi.
C’est une ville idéale pour avoir des enfants. Peu importe où on est, je pense que c’est ce que je me suis toujours dit, on peut être heureux ou malheureux n’importe où. C’est ce qu’on fait dans la ville dans laquelle on vit qui fait qu’on est bien ou pas. Il faut juste voir le bon côté de tout. On continue encore des fois à découvrir des choses.
Comment l’idée te vient de basculer de la communication vers la restauration ?
L’eau vient d’Orléans la source, les légumes viennent en grande majorité de la ferme des Beaux regards, mais aussi de la Biocoop et de l’entraide Berruyère. Pour la viande, elle vient directement de mon boucher. Je sais que ce n’est pas l’idéal en terme de rentabilité, mais c’est un partenaire de confiance car ils sont également éleveurs à Sainte Solange. Les oeufs viennent de Saint Michel, le crottin de Chavignol vient de Neuvy-Les-Deux-Clochers, les poulets viennent du village Le Châtelet, enfin j’essaye toujours d’être dans un rayon autour de Bourges. J’aimerai aussi mettre en place un système de consigne pour les plats à emporter, pour éviter le plastique. J’ai envie d’être dans une démarche qui me ressemble.
Quand je leur ai fait part de ma volonté de monter quelque chose de mon côté, tout s’est bien passé et j’ai été bien accompagnée par la BGE 18 pendant deux ans pour structurer le projet. J’ai hésité à faire les marchés, d’autres formats que le restaurant classique, puis la Covid est arrivée, et finalement ce qui revenait tout le temps dans ma tête c’était «.non, tu veux accueillir du monde et être avec les gens.». C’est là que mon premier métier m’a servi pour cadrer mon business plan, pour la partie marketing, et pour la créativité dans les assiettes. Ça fait très drôle d’en parler parce que j’avais jamais posé les mots sur ça.
Ton père a donc joué un rôle important dans ce changement professionnel ?
J’ai cette passion. Un commerce et accueillir des gens, ça, c’est un truc que j’adore. Et puis, entendre ce petit brouhaha de gens qui parlent et mangent, qui discutent entre eux, les jeux de couverts, les verres qui traînent, tout ça, j’adore. En même temps, avec mon père, pour faire le lien, même s’il a eu différents métiers après, il a toujours cuisiné, même dans la famille, on a toujours fait des grandes tablées. Avec ma soeur, on a été ses petits commis, on a toujours eu la tête dans la gamelle. Et puis nos grands-mères cuisinaient beaucoup elles aussi.
Il y a déjà plein de très bons restaurants sur Bourges, mais c’est vraiment ma petite personne qui avait super envie de faire découvrir mes plats, ma façon de cuisiner, toutes mes influences aussi, parce que j’adore la cuisine traditionnelle et en même temps, j’aime bien mélanger avec des petites saveurs rigolotes, avec des choses qui changent, qui pètent, qui surprennent. Même des fois, mon père, il me dit « Mais qu’est-ce que tu mets dans la blanquette ? Du curcuma, des épices ?.», et je lui réponds «. Mais oui t’inquiètes, ça va pimper un peu la recette, tu mets bien du chocolat dans ton bourguignon toi.».
Voilà, qu’est-ce que tu voulais que je fasse ? Autre chose que fi nir par être cuisinière. Je savais que je voulais être à mon compte un jour, je savais que j’aurais ma petite a. aire. Il y a plein de choses qui m’intéressaient dans l’absolu, mais il y a une espèce d’évidence quand on a eu Jean. Je me suis dit, mais en fait, oui, c’est la cuisine. C’est vraiment le truc que j’aime faire et qui n’est pas juste un travail, c’est aussi une passion. Ça fait partie de moi.
Comment décides-tu de transformer ce lieu pour en faire ton repaire ?
Je l’ai conçu toute seule, mais il a été étoffé par les oeuvres des copains qui ont contribué à enrichir ce lieu. Ce n’est pas que rien n’est laissé au hasard, mais tout est fait avec affect. Pour la petite histoire, la couleur des murs est la même que chez moi, pour dire à quel point j’ai envie qu’on se sente «.comme à la maison.». C’est un prolongement de moi.
Parle-nous de ta démarche concernant ta façon de travailler et de consommer.
L’eau vient d’Orléans la source, les légumes viennent en grande majorité de la ferme des Beaux regards, mais aussi de la Biocoop et de l’entraide Berruyère. Pour la viande, elle vient directement de mon boucher. Je sais que ce n’est pas l’idéal en terme de rentabilité, mais c’est un partenaire de confiance car ils sont également éleveurs à Sainte Solange. Les oeufs viennent de Saint Michel, le crottin de Chavignol vient de Neuvy-Les-Deux-Clochers, les poulets viennent du village Le Châtelet, enfin j’essaye toujours d’être dans un rayon autour de Bourges. J’aimerai aussi mettre en place un système de consigne pour les plats à emporter, pour éviter le plastique. J’ai envie d’être dans une démarche qui me ressemble.
Après toutes ces étapes, comment se porte le Café Louve aujourd’hui ?
Nous sommes ouverts depuis le 9 octobre 2023, et on a déjà nos petits habitués. Je commence à connaître les prénoms, les habitudes de chacun, il y aussi pas mal de profs qui travaillent autour du café. Je ne fais pas trop de pub, je communique un peu sur les réseaux, mais le bouche à oreille commence à faire son bout de chemin, et si c’est bon dans l’assiette, la réputation va se faire d’elle-même. On a eu la chance que ça fonctionne très bien très vite, je suis complet quasiment tout le temps, le « à emporter » marche très bien, le rythme se fait vraiment en fonction des gens. Ça peut être pour le midi, le goûter, les plats du soir à emporter, j’ai des petites mamies qui viennent tricoter l’après-midi, des jeunes retraités qui viennent de 17 à 18h.
J’ai des ados, des petits cinquièmes qui viennent super souvent, ils s’offrent leur tournée de limonade chacun leur tour. Ils m’ont fait un petit mot « Vous êtes le meilleur café » en signant au dos, c’est trop mignon !
L’autre jour, je leur ai fait goûter des cranberries. J’ai dit « goûtez ça les gamins », et ils repartent en me disant « Au revoir, merci madame, vous êtes trop sympa ». Ça rassemble vraiment toutes les générations et tous les styles.
Tu as déjà des projets pour la suite ?
J’attends déjà de bien prendre mon rythme, le café est encore très récent, mais j’aimerais bien étoffer ma carte avec des petits trucs sur le pouce et des formules pour étudiants. Le concept des commandes suspendues pour les personnes qui ont besoin d’un plat et qui n’ont pas les moyens est à explorer aussi. Faire venir des intervenants pour animer des ateliers : cuisine, lecture, tricot… là encore, les amis qui m’entourent sont pleins de ressources !
As-tu déjà vécu un moment magique depuis l’ouverture ?
Il y en a plusieurs. Celui qui m’a marqué, c’est une dame qui est venue un jour pour manger un midi, il y avait du boeuf carotte au menu. Elle m’a dit que ça lui rappelait la recette de sa mère et ses souvenirs d’enfance. C’est fort quand les émotions arrivent à passer dans l’assiette. Et j’ai aussi le fait que ma soeur est ouvert son commerce à côté, le centre Skin & Body Tech’. C’est du hasard, une petite touche magique qui fait notre bonheur !
Une petite anecdote pour la fin ?
L’anecdote que je raconte des fois aux gens, c’est le monsieur qui m’a claqué des doigts pour m’appeler. Déjà, il m’a imposé la réservation. Il est passé me dire « vous me réservez une table, je vais venir avec mon ami.», je lui ai répondu que je ne prenais pas encore de réservation, mais il a insisté. J’ai été surprise sur le coup. Il est effectivement venu, au menu, c’était des pommes boulangères avec un rôti de porc au jus, et pour m’appeler, il a claqué des doigts…. Je lui ai fait comprendre gentiment que c’était un peu daté comme manière. Heureusement il a apprécié son plat, et je peux d’ailleurs le remercier d’avoir lancé les résas, c’est bien plus confort pour la clientèle !
Lorsqu’Audrey est partie au Café Louve pour réaliser sa toute première interview, elle s’est retrouvée avec une nouveauté dans nos rencontres : une invitée surprise … La grand-mère de Christelle est arrivée faire un coucou, et croyez-nous, elle n’a pas fait qu’écouter !! Au grand dam de Fred qui a recoupé et mis en page l’article, l’enregistrement de la conversation est incroyablement drôle, puisque les voix de ces trois là se confondent dans les rires et les larmes d’émotions, ainsi que dans les anecdotes abracadabrantesques et les histoires rigolotes. Si un jour un bêtisier de Tativu devait sortir, il commencerait par là. Bisous à Mamie Marilou !
T'as ti vu ce qu'en pense l'équipe ?
Beaucoup d’émotions pendant cette interview sincère et naturelle : en résumé, on est dans une cantine de quartier comme à la maison, et on se sent bien ! On sourit, on discute avec le voisin de table, on rigole, on retrouve quelqu’un qu’on connait, on mange bon et on redécouvre des goûts. On vous assure, ici, c’est doux et gourmands !
Interview réalisée dans le Café Louve le 04/12/2023
avec la participation de Christelle et Marilou.
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