La culture Manga à Bourges avec 2 acteurs investis
Au cœur de Bourges, une communauté passionnée de manga et de culture japonaise s’est épanouie, portée par des entrepreneurs qui partagent un amour profond pour cet univers. Nous avons rencontré Stéphane Meslage, gérant de la boutique Kimeshoten, Louane sa collaboratrice et Maxime, fondateur du salon de thé japonais MANGA-T. Retour sur leur parcours et leur vision de la culture manga aujourd’hui.
Vous vous présentez aux lecteurs ?
Stéphane : Moi, je suis M. Meslage Stéphane, originaire de Bourges. Ça fait 23 ans que je suis le gérant de la boutique Kimeshoten, qui a toujours été spécialisée en mangas et qui a eu quelques bonus, au fil des années : les maquettes, les répliques, les sabres, etc. Je suis le premier et le plus ancien à Bourges. Et c’est par pur hasard ! En allant dans une boutique sur Orléans, en discutant avec eux, il y avait beaucoup de gens de Bourges qui venaient les voir. Donc j’ai étudié si c’était faisable et j’ai ouvert. Après, par contre, il faut bien noter une chose, c’est qu’il y a 23 ans, ça marchait beaucoup moins bien que maintenant et pour en vivre, il m’a fallu des années.
Lou-Ann : Je m’appelle Lou-Ann, j’ai 22 ans, je suis née à Marseille. Mon papa est militaire, donc on a déménagé à Bourges quand j’étais en CM1-CM2. Ça fait peut-être 10 ans que je viens au sein de la librairie. Ensuite, j’ai fait un stage de troisième. J’ai commencé à travailler au sein de la boutique début 2021, en alternance quand j’étais à l’Estacom, donc en communication-marketing. Au sein de l’entreprise, je fais tout ce qui est communication sur les réseaux sociaux, gestion du site internet, et la partie événementielle.
Maxime : Moi, je m’appelle Maxime. J’ai ouvert le salon de thé japonais Manga-T. Je suis pas de Bourges, je suis de Dijon et je suis venu là il y a 14 ans, parce que je travaillais pour le club de baseball de Bourges, en tant qu’éducateur sportif. J’ai eu l’idée en partant en voyage au Japon en 2018. J’avais vraiment envie de ramener une part du Japon sur Bourges, surtout tout ce qui est nourriture qui est, pour moi, excellente.
Le temps que ça fasse un petit tour dans ma tête, je me suis lancé fin 2019, je travaillais le projet avec Laetitia, parce que Manga-T c’est une licence de marque qui est à Dijon. Puis le Covid est arrivé. Et finalement, j’ai ouvert en février 2021.
Cet univers a-t-il toujours été une passion ?
Maxime : J’ai commencé j’avais 8 ans, avec Pokémon, Yu-Gi-Oh, Dragon Ball, les Chevaliers du Zodiaque. Et puis après, ça ne s’est pas arrêté. D’ailleurs, j’en suis venu au baseball avec un manga sur le baseball.
Stéphane : Oui, j’aime beaucoup ça. Comme plein de ma génération, j’ai commencé à lire des mangas quand j’avais une quinzaine d’années.
Comment voyez-vous l’évolution de la culture manga à Bourges ?
Lou-Ann : Je trouve qu’après Covid, il y a eu un changement de mentalité envers les personnes qui consomment du manga. Avant le Covid, tu disais : «Je lis des mangas». Tu étais un peu vu comme le geekos c’est ton monde un peu bizarre.
Stéphane : C’est enfin rentré dans les mœurs et c’est rentré dans la pop culture, vraiment. En France, on est les deuxièmes consommateurs de mangas au monde.
On travaille avec beaucoup de lycées qui ont des clubs de mangas. Nous avons également créé avec les différents établisssements scolaires un concours se nommant le Manga Yon. C’est un concours permettant de faire découvrir certains titres manga moins connus méritant d’avoir plus de visibilité. On est six ou sept lycées, plus la médiathèque. Et ça fait déjà des années qu’on organise ça avec une petite sélection tous les ans, pour faire participer les élèves en essayant de leur sélectionner des choses qui sortent un petit peu des sentiers battus, mais qui restent quand même dans leur tranche d’âge. On sent qu’il y a un réengouement.
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Comment ont évolué vos commerces ?
Stéphane : Moi, quand j’ai commencé, il y avait un vrai besoin à Bourges. Par contre, ça restait vraiment une niche, depuis une dizaine d’années, c’est devenu beaucoup plus grand public. J’ai vu une vraie évolution sur ça, où on a quand même progressé en termes de clientèle, de chiffre d’affaires, etc. Par contre, le marché du manga a été très fluctuant donc très compliqué à gérer en termes de trésorerie, de gestion vraiment pure et dure de commerces. Et là, le COVID a au moins fait une bonne chose, c’est que les gens se sont ennuyés et beaucoup se sont mis ou remis au manga.
Ma logique pour évoluer, c’est que je ne fais que des choses que je maîtrise ou alors que j’apprends à maîtriser, et puis si possible que j’aime, tant qu’à faire. Là, par exemple, je suis en train d’aménager l’arrière de la boutique qui est en extérieur, mais abritée, pour faire de l’événementiel.
Maxime : Depuis l’ouverture, j’ai fait la première année et demie tout seul en ouvrant du mardi au samedi. C’était bien, il y avait beaucoup de monde. Puis, au bout d’un moment, c’était difficile. Donc, j’ai cherché un employé. J’ai trouvé Alexis, qui est là depuis deux ans, qui était en temps partiel au début et que j’ai passé depuis un an en temps plein. Lui est plus orienté sur tout ce qui est mangas coréens et chinois, il est orienté K-pop. Du coup, j’ai plus le côté un peu traditionnel et manga. Donc c’est vrai qu’on se complète quand même pas mal.
On crée de plus en plus d’animations. Je n’ai pas toutes les compétences, mais j’ai un magasin qui réunit beaucoup de monde et je peux proposer un lieu pour que les gens puissent faire des activités.
Là, par exemple, j’ai Léana qui fait de la calligraphie. On a fait habillage de kimonos. Je fais venir Emilie qui fait du massage Ama-assis, on fait un tournoi de Smash Bros parce que c’est toujours dans l’univers geek, et je fais appel à deux amis qui sont collectionneurs de jeux vidéo et qui viennent organiser ce tournoi.
Le choix du lieu a été difficile ?
Stéphane : Quand j’étais petit, j’allais avec mon grand-père au Jouet Club, qui était un peu plus haut. Et je m’étais toujours dit : Tiens, si un jour je devais avoir une boutique, je ne sais pas pourquoi je me voyais là. J’étais plus familier de la rue d’Auron que forcément du reste du centre-ville. Et puis surtout, le bonus, c’est que la rue d’Auron, c’était là où le loyer était le moins cher.
Depuis, je trouve que c’est une rue qui mérite d’être défendue parce qu’il suffit de regarder, de remonter la rue et de regarder les commerces, on se rend compte qu’il y a tout. Ça vit. Et en plus, souvent, c’est une rue de spécialistes.
Maxime : Moi j’ai dû faire un choix. Vous verrez, si vous passez à Manga-T, j’ai un sous-sol. À la base, je voulais vraiment quelque chose à plat. On a visité quand même pas mal de choses. J’avoue que les tarifs étaient exorbitants, donc le prix, ça a fait beaucoup. Et puis, en fin de compte, en réfléchissant un peu, je me suis dit : Je veux un côté néo-tokyo et je veux un côté traditionnel. Vu que j’ai deux salles, ça m’a permis d’avoir vraiment ces deux parties différentes. Ce qui est bien aussi, c’est que je me suis dit qu’on a quand même des clients qui sortent un peu de l’ordinaire et du coup, je suis dans un endroit où les gens sont tranquilles.
On m’a beaucoup dit : «Vous êtes dans un renfoncement», ouais, mais en fait, je suis un lieu où les gens viennent parce qu’ils ont envie de venir.
Contrairement à ce qu’on pense, il y a énormément de passages au niveau des Jacobins. C’est juste qu’il manque un peu de beauté dans ce passage.
J’ai cherché aussi à toujours être à cinq minutes d’un parking gratuit. Et là, de Séreaucourt, on est à 6 minutes si on peut marcher un peu.
Comment vous êtes-vous connu ?
Maxime : Moi, j’étais client de la boutique de Stéphane. Et puis, au moment où j’ai eu le projet, quand c’était acté, je suis venu me présenter en disant : «Je veux ouvrir un salon de thé». Je vends pas de mangas, il y a que de la lecture sur place donc, on ne fait pas les mêmes activités. Moi, je suis surtout sur de la nourriture. Et puis Stéphane, c’est vraiment sur les produits, voilà. Ce qui fait qu’on est réellement complémentaires. On arrive à pas se marcher sur les pieds, on a bien le même public, mais en proposant deux choses différentes.
Quels sont les atouts de vos commerces ?
Maxime : À Manga-T, les gens viennent, parlent du Japon traditionnel et puis le fait de partir en voyage. Moi, je suis parti deux fois au Japon, j’adore en parler, soit qu’ils me fassent découvrir des régions où ils sont allés que je ne connais pas, soit l’inverse, je parle de mon expérience. Ça, j’adore ça. C’est vraiment cool. Si un jour, vous voulez partir au Japon, venez discuter au magasin. Pour moi, mon salon permet de réunir les gens qui ont une passion en rapport avec le Japon. Le Japon ou même un peu la Corée maintenant.
Stéphane : On a entre 10 et 12 000 références en moyenne. À ma connaissance, nous sommes ceux qui avons le plus de références sur Bourges. Je vais peut-être dire 100 kilomètres à la ronde. On essaie de garder un maximum de titres longtemps, même quand les séries sont finies. Notre point fort c’est le conseil ! Ça fait presque 30 ans maintenant que j’en lis donc, j’arrive à conseiller, même des gens qui n’en ont jamais lu. Et en plus, on a tellement de choix, de styles différents, c’est sans limites. Et normalement, on peut trouver un manga qui plaira pour quasiment n’importe qui, tant qu’il n’est pas réfractaire au format bande dessinée.
On parle de ce que vous créez ensemble ?
Stéphane : J’essaie, quand je le peux, de l’emmener sur mes événements à moi. Je prends l’exemple de la soirée qu’on va faire dans pas longtemps. J’ai invité Maxime pour qu’il soit aussi présent à cette soirée. Pour les gens, il y a quelque chose à manger et à boire, en plus du côté des petites animations de ce qu’on va proposer.
Maxime : On a créé un festival traditionnel japonais appelé Berry Matsuri. Les «Matsuri», sont des festivals et fêtes populaires traditionnels japonais.
Le porteur de projet est Sakura Berry, une des deux associations franco-japonaise, avec 4 autres organisateurs : Ô ShaBerry ( asso franco-japonaise ), Hana Berry Pop (association de dans K-pop), Kimeshoten, et Manga T. Le but du jeu, pour Sakura Berry, c’est de réunir toutes les associations et tous les commerces qui sont en rapport avec le Japon pour pouvoir construire un partenariat avec une ville japonaise dans les 5 à 10 ans à venir. C’était la première édition, on s’attendait à 300 personnes, on en a eu 1400.
Lou-Ann : L’idée, c’est de créer un événement qui puisse vivre sur les années, qui puisse se développer, qui puisse faire découvrir plein d’autres entités autour du Japon. Parce que souvent, les gens pensent que le japon, ce n’est que des mangas et des sushis. Le Japon, ça existe depuis des milliers d’années, il y a toute une histoire.
Ton classique en lecture ?
Stéphane : Je vais dire City Hunter, c’est un des premiers mangas qui a été édité en France, que j’ai pu lire en version papier et qui m’a donné vraiment envie d’en lire plus.
Lou-Ann : Moi, mon classique, je dis Sun Ken Rock de Boichi
Maxime : moi, 20th Century Boys, c’est Urasawa.
Mais, j’aurais pu mettre Major. C’est grâce à ça que j’ai fait du baseball, que je suis sur Bourges et que pour moi, j’ai ouvert le Manga-T. Il est assez symbolique, j’avoue.
Ton incontournable en nourriture ?
Maxime : Dessert, les daifukus, c’est ce qu’on appelle mochi en France, mais ce n’est pas vrai. Ça s’appelle daifuku. Parce que du coup, le mochi, c’est la pâte de riz gluant et le daifuku, c’est la pâtisserie avec la farine de riz gluant et à l’intérieur, quelque chose, une garniture. Le mochi, au Japon, est utilisé dans énormément de recettes différentes, même dans du salé.
Stéphane : À moi, c’est ramen !
Lou-Ann : Le curry japonais (on fait exprès les réunions le vendredi parce qu’il fait curry!)
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T'as ti vu ce qu'en pense l'équipe ?
Ces acteurs de la scène manga à Bourges incarnent une véritable passion pour la culture japonaise et geek, qu’ils partagent avec un public de plus en plus large. Grâce à leur complémentarité et à des initiatives communes comme le Berry Matsuri, ils contribuent à ancrer la culture manga dans les habitudes locales. Leur succès témoigne de l’évolution rapide de ce secteur, aujourd’hui devenu incontournable dans la pop culture à Bourges. Longue vie à vous et à votre festival naissant !
Interview réalisée à Kimeshoten
le 26/09/2024 avec la participation
de Stéphane, Louane et Maxime.
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